Mer de Chine : entre les grosses vagues, Pékin tente d’apaiser Washington

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Asie Pacifique News , 22/02/2017: Face aux prédictions d’une guerre en Mer de Chine méridionale — d’ici dix ans — déclarées par Steve Bannon, conseiller de Donald Trump chargé de la stratégie, le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi a déclaré mardi le 8 février 2017 à Canberra, Australie qu’une « guerre entre les États-Unis et la Chine était impensable en raison des pertes catastrophiques que le conflit occasionnerait aux deux côtés. » Cependant, le fait même que Wang ait été interrogé sur la position verbale « agressive » du gouvernement Trump envers Pékin est une autre indication de la crainte croissante de conflit entre les deux puissances nucléaires dans le contexte où Pékin revendique la majeure partie de la mer de Chine méridionale. Des revendications sans fondation juridique contestées par les autres nations riveraines comme les Philippines, le Vietnam, le Brunei, la Malaisie. Rappelons que la mer de Chine méridionale et ses îlots considérés riches en ressources constituent un couloir maritime stratégique du commerce mondial et de défense.

Washington hausse le ton

Alors que les relations entre Pékin et Washington se trouvent tendues depuis l’élection de Donald Trump, une déclaration de Steve Bannon — l’éminence grise du président —, évoquant un conflit futur entre les deux nations, refait surface : « Nous irons à la guerre dans la mer de Chine méridionale d’ici cinq à dix ans. […] Il n’y a aucun doute là-dessus… Ils [les Chinois] s’emparent des bancs de sable et y construisent des bases militaires, y installent des missiles. Ils viennent ici, aux États-Unis, juste devant notre nez, et disent que ces eaux territoriales sont à eux de longue date. » Puis, dans une autre déclaration repérée par le Guardian, Bannon avait déjà dévoilé son « obsession » chinoise : « Il y a un islam expansionniste et une Chine expansionniste. Ils sont déterminés, arrogants. Ils sont en marche. Et ils pensent que l’Occident judéo-chrétien est en recul. »

Steve Bannon n’est ni le premier ni le seul homme fort du gouvernement de Donald Trump à s’inquiéter d’un possible conflit en Mer de Chine. Rompant avec la prudence de Barack Obama sur ce dossier, l’équipe de son successeur n’hésite pas à multiplier les menaces à l’encontre de la Chine au risque de provoquer une dangereuse escalade entre deux grandes puissances.

Lundi 23 janvier 2017, le tout nouveau porte-parole de la présidence américaine, Sean Spicer, avait ainsi assuré que les Etats-Unis « protégeraient leurs intérêts » dans la région : « Si ces îles sont en fait dans les eaux internationales et ne font pas proprement dit parties de la Chine, nous ferons en sorte de défendre les intérêts internationaux pour qu’ils ne soient pas sapés par un autre pays. »

Deux semaines plus tôt, le futur secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson s’était montré encore plus précis, signifiant à la Chine que les travaux de remblaiement qu’elle entreprendrait sur les îlots qu’elle occupe, afin de les agrandir, devaient cesser : « Nous allons devoir envoyer un signal clair à la Chine. Premièrement, la construction d’îles doit s’arrêter. Deuxièmement, l’accès à ces îles ne sera plus autorisé […] Que la Chine contrôle ou déclare contrôler des territoires qui ne lui appartiennent pas de façon  légitime. »

De même, le Secrétaire à la Défense de Donald Trump, James Mattis, a réaffirmé que l’archipel des Senkaku en mer de Chine orientale, contrôlé par Tokyo mais revendiqué par Pékin, était couvert par l’alliance militaire entre les Etats-Unis et le Japon tout en concluant un accord avec Séoul pour déployer un système de missiles anti-missiles balistiques (THAAD) en Corée du Sud et menacer la Corée du Nord d’une force « écrasante » si elle attaquait les États-Unis et leurs alliés.

Pékin oscille entre l’appaisement et l’irritation

En réaction à ce haussement de ton américain, le Parti communiste chinois (PCC) cherche tantôt à apaiser Washington et tantôt de se lancer dans une course aux armements qui ne fait qu’accroître le risque de conflit. Récemment, s’exprimant lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue australienne Julie Bishop, le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi s’est efforcé de minimiser le risque de guerre en déclarant que, malgré les « difficultés parfois irrationnelles concernant les relations sino-américaines » au cours des quatre dernières décennies, la relation avait « défié toutes sortes d’accrocs et progressé sans interruption […] Tous les responsables politiques sérieux reconnaissent clairement qu’il ne saurait y avoir un quelconque conflit entre la Chine et les Etats-Unis […] Les deux pays seraient perdants et ils ne peuvent certainement pas se permettre ça. »

Peu après, en marge d’une réunion du G20 à Bonn, en Allemagne, lors de son entretien avec Rew Tillerson, a poursuivi Wang Yi d’une part : « La Chine est prête à approfondir les coopérations et à assurer le bon développement des relations avec l’administration du président Trump selon les principes de non confrontation et de respect mutuel. Que les deux Etats portent la responsabilité conjointe de préserver la stabilité du monde et de promouvoir la prospérité planétaire, et ont bien davantage d’intérêts communs que de divergences. »

D’autre part, les autorités chinoises se sont montrées inflexibles, affirmant mardi que la souveraineté de la Chine dans cette région était « indiscutable » et se disant, dans un écho aux propos américains, résolues à défendre leurs « droits et intérêts ». Un haut responsable de la Commission Militaire Centrale chinoise, Liu Guoshun, a même averti que « une guerre au cours du mandat du président américain, une guerre qui éclaterait ce soir, ce ne sont pas seulement des slogans mais la réalité. »

Une possible guerre tiède

Bien que le président Donald Trump, après une pirouette, ait assuré à son homologue Xi Jinping qu’il respecterait le « principe de la Chine unique » interdisant tout contact diplomatique entre des pays étrangers et le Taiwan lors d’un entretien téléphonique Trump-Xi à l’occasion du Nouvel an lunaire, le contexte de tension reste très loin de la détente. Or, dans le pire des cas, certains experts en géopolitique ne croient pas aux perspectives d’une guerre sino-américaine comme rapporte le quotidien français Le Figaro : « Sans aller jusqu’à une déclaration de guerre à la Chine, on peut imaginer une présence militaire américaine beaucoup plus importante dans les zones contestées », citant Valérie Niquet, responsable du pôle Asie de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS). Et « le scénario le plus dangereux vers lequel nous nous dirigeons serait une cristallisation de la politique asiatique de la nouvelle administration américaine autour de la mer de Chine méridionale qui serait totalement inefficace tant que les délimitations maritimes entre les différents États de la région ne sont pas clairement définies », selon Benoît de Tréglodé, directeur de recherche à l’Institut de Recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM), un organisme du ministère français de la défense.

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