Charles et Tereza, mariés, trois enfants, n’en sont pas à leur première expérience vietnamienne. Après s’être spécialisés dans la rénovation des villes anciennes de la région du Maghreb, ils arrivent une première fois en 2003. Charles travaille alors pour l’ONG “Villes en transition” dont l’objectif est d’améliorer les conditions de vie en milieu de pauvreté urbaine, tandis que Thereza travaillait dans un bureau d’architecture australien.

Rentrés en France en 2005, Charles crée le bureau T3 avec des amis, spécialisé en architecture écologique. Tereza finit par les rejoindre.

Puis en 2011, juste avant que leur fille aînée ne rentre au CP, l’envie de repartir en famille cette fois les tenaille, et ils décident assez naturellement de revenir à Saigon. Ils partent alors avec leurs deux enfants (le troisième sera conçu ici) et deux valises, après avoir mis leur appartement français en location. L’idée première est de trouver un emploi salarié ici, mais une brève expérience peu concluante les encourage à créer ensemble le bureau T3 Architecture Asia, qui compte aujourd’hui quatre personnes et collabore régulièrement avec d’autres architectes selon les projets.

L’architecture écologique : une idée qui doit faire son chemin

Quand on leur demande s’il y a de la demande pour l’architecture écologique ici, Charles parle plutôt de frémissement. “Du potentiel, il y en a, mais l’idée doit encore faire son chemin. Des lois qui vont dans le bon sens existent, mais elles sont assez peu respectées. Comme les choses évoluent vite ici, j’ai bon espoir. Il suffit de quelques projets qui montrent l’exemple et donnent envie...” Les bureaux spécialisés dans l’architecture écologique sont encore peu nombreux à Ho Chi Minh-Ville, comparé au nombre de projets de construction. T3 n’a pas plus de deux ou trois concurrents dans cette niche pour l’instant.

Là où la demande est plus sensible, c’est dans l’hôtellerie, car ce sont généralement de grands groupes ayant des politiques de développement durable en place. Ou alors de plus petites structures conscientes des attentes d’une clientèle internationale. “Mais dans la construction résidentielle, les commanditaires sont souvent des nouveaux riches vietnamiens, qui tiennent beaucoup à l’aspect ‘bling bling’ : grande baies vitrées exposées, équipement high tech énergivore...” ajoute Charles. Il explique aussi que traditionnellement au Vietnam, les architectes sont mal payés et se rémunèrent en prenant un pourcentage sur les matériaux et produits placés, ce qui pousse au surdimensionnement inutile. De leur côté, ils ont pris le parti inverse et ne prennent aucune commission.

“Nous nous efforçons surtout de veiller à réduire les besoins énergétiques, notamment en travaillant sur la protection solaire et la ventilation naturelle, avant d’avoir recours aux technologies, comme le photovoltaïque par exemple.”

C’est le pari qu’ils ont tenu en réalisant le KOKOIS, nouveau café sur Thao Dien, quasiment dénué de climatisation, hormis dans la salle fermée du restaurant.

Comment voient-ils leur avenir au Vietnam ? “Cette année, nous cherchons activement de nouveaux associés pour stabiliser le bureau vietnamien, puis d’ici quelques années, nous nous voyons bien rentrer en France et poursuivre la collaboration avec le bureau asiatique.”

Double toiture, ventilation, espace ouvert: seule une petite salle est climatisée au KOKOIS.

http://www.lepetitjournal.com/hochiminhville/communaute-expat/communaute/224864-portrait-d-expats-charles-tereza-et-l-architecture-ecologique